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En 1794, la mise en vente de la
récolte se fait par voie d'affichage. Les négociants déposent sur les lieux mêmes de
la vente une enveloppe contenant l'offre de prix. Le plus offrant emportait le marché, à
la condition sine qua non qu'il ait respecté le prix plancher fixé par l'administration.
Lorsque ce prix n'était pas atteint, la vente était purement et simplement reportée.
1820 : l'institution décide de procéder par vente aux enchères publiques. Le
système est certes valable, mais son essor véritable nécessitera plusieurs
années
et l'énergie d'un certain Joseph Pétasse, économe des Hospices de Beaune,
qui contribua largement à faire connaître ces vins bourguignons.
Infatigable ambassadeur des Hospices, vigneron et homme de lettres, Pétasse fit le tour
de l'Europe, vantant les vertus et qualités des vins bourguignons aux acheteurs
potentiels. Une démarche éreintante, couronnée de succès : en moins de deux ans,
Pétasse vend l'intégralité du stock des Hospices aux négociants !
Notre homme en tire une légitime fierté, qui l'autorise à déclarer aux administrateurs
: "Messieurs, vous pouvez reprendre dès cette année la vente aux enchères
publiques. Il est désormais inutile de nous déranger : la clientèle est faite, nos vins
sont connus et ce sont maintenant les amateurs qui viendront à nous !".
L'avenir confirmera ces audacieuses paroles.
1924 : la vente est désormais fixée au troisième
dimanche de novembre. Elle se déroula d'abord dans la cour de l'Hôtel-Dieu, avant
d'être transférée à la cuverie, de 1925 à 1958.
A nouveau, le succès est au rendez-vous pour les Hospices. Tant et si bien qu'il faut,
dès l'année suivante, faire venir vendeurs et acheteurs à la Halle de Beaune, plus
vaste et d'un accès aisé. La réussite de la vente annuelle n'abuse pas les
administrateurs, qui ne font aucune concession sur la qualité de "leurs" vins :
les cuvées 1956 et 1968 ne furent ainsi pas mises aux enchères et les ventes
correspondantes annulées, en raison d'une production jugée "médiocre".
Solennelle est la flamme
Le jour J, le Maire de Beaune, en sa qualité de président du conseil d'administration
des Hospices, les administrateurs, le directeur et ses collaborateurs, ainsi que le
commissaire-priseur accueillent une personnalité de choix : le président d'honneur.
Choisi parmi les membres des plus hautes familles royales d'Europe (Otto de
Habsbourg, le Duc de Kent
),
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ou, selon un usage plus
récent, parmi les personnalités les plus prisées des arts et des lettres (Catherine
Deneuve, Barbara Hendricks, Lino Ventura, Rostropovitch), ce
parrain - ou cette marraine - se voit remettre une pièce de vins, environ 300 bouteilles,
qu'il remet immédiatement en vente. Les bénéfices de la vente de la pièce sont
intégralement versés à l'association caritative de son choix.
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Les officiels, impassibles, s'installent à la tribune. De leur côté, les acheteurs
prennent place. Le bruit se fait silence. Les enchères peuvent commencer. Plancher de
mise à prix : 1 000 francs. La procédure est immuable : les enchères se font à la
bougie, sous l'il attentif du commissaire-priseur.
Durant deux feux, soit la combustion de deux bougies, les acheteurs font leurs choix. La
taille des bougies est indexée sur le montant initial de l'offre. Cette procédure au
caractère solennel et hautement symbolique, n'a pas de réelle influence sur le
déroulement de la vente : elle a toutefois le mérite d'accorder un délai de réflexion
aux acheteurs potentiels.
A l'exception de la pièce de charité, toutes les cuvées sont vendues par lot. Les
professionnels du vin, français et étrangers, accordent une attention toute
particulière aux montants. S'ils sont supérieurs au prix du négoce, ils n'en reflètent
pas moins la première côte de production.
"Couverte" par les médias du monde entier, la vente est également l'occasion
pour les négociants d'une publicité qui ne peut que servir leur image de marque. Une
réputation qui n'est pas le seul fait de l'influence cathodique : pour apposer leur nom
sur les étiquettes fournies par les Hospices de Beaune, les acquéreurs doivent respecter
une liste draconienne d'obligations, notamment celles d'élever le vin en Bourgogne
vinicole et de le mettre en format traditionnel de bouteille (75 cl).
Enfin, l'art du vin n'ayant d'égal que celui de la table, les enchères s'achèvent
autour d'une grande table, un repas de gala aux chandelles illuminant le Bastion des
Hospices et ses pierres médiévales. ''Lorsque la dernière bougie s'éteint
"
En résumé :
Depuis 1931, un commissaire-priseur est l'animateur de cette après-midi.
L'ambiance est sérieuse, calme, concentrée.
Le commissaire-priseur débute son intervention par l'annonce des différentes
dispositions légales et présente brièvement l'ensemble des lots mis aux enchères.
Le commissaire-priseur décrit avec précision chaque lot (nombre de pièces, cépages,
appellation, ...)
Il fixe le montant minimal de l'enchère.
Le Crieur, assis à ses côtés, stimule et motive les enchérisseurs.
Dans la salle, dans chaque allée, les rabatteurs répercutent les offres des
enchérisseurs. Celles-ci sont reprises au micro par le Crieur.
Les bougies qui s'allument et s'éteignent marquent la durée des enchères.
A l'extinction de la 3ème bougie, le commissaire-priseur reprend la parole.
Il annonce la fin de l'enchère, interpelle les derniers enchérisseurs puis, si personne
ne se manifeste, adjuge la pièce.
Un rabatteur transmet alors l'identité de l'acheteur au commissaire-priseur qui l'annonce
au micro. Le lot suivant est ensuite décrit et le processus se répète ainsi toute
l'après-midi.
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